Le pacte germano-soviétique
Le 21 août 1939, Hitler propose officiellement un pacte de non-agression à Staline que ce dernier s’empresse d’accepter.
Il est signé par von Ribbentrop et par son homologue soviétique Vyatcheslav Molotov pour une durée de dix ans. Ce pacte inclut une aide économique de l’URSS à l’Allemagne Nazie (livraisons de blé, de pétrole et autres matières premières). Les deux dictatures se sont également mises d’accord via l’ajout d’une clause secrète sur le sort de la Pologne qui sera partagée en deux. Une autre clause secrète prévoit également la remise à l’Allemagne de militants communistes allemands qui s’étaient réfugiés en union soviétique.

Leur allié polonais envahi le deux septembre et battu peu de temps après, la France et l’Angleterre n’ont d’autre choix que de déclarer la guerre à l’Allemagne qui après avoir tergiversé pendant de longs mois (c’est la drôle de guerre) fond sur la France qui capitule, après une campagne extrêmement meurtrière des deux côtés, en juin 1940.

Débarrassé bien plus vite que prévu de l’armée française, qui passait à l’époque pour être la meilleure du monde, Hitler n’a plus que le Royaume Uni comme ennemi en Europe. L’armée britannique s’étant réfugiée outre manche en rembarquant à Dunkerque grâce au sacrifice de dizaines de milliers de soldats français, elle ne constitue pas un danger immédiat.
Hitler fond sur l’URSS
Ayant les mains libre le Führer se tourne alors vers son allié d’hier : l’URSS. Le 22 juin 1941, Staline est réveillé à quatre heure du matin par le général Joukov qui l’informe laconiquement : « C’est la guerre ! ».
En effet, les nazis qui viennent de déclencher l’opération Barbarossa déferlent sur le territoire soviétique sans déclaration de guerre préalable.
L’offensive allemande entraîne la rupture des relations diplomatiques entre Moscou et le gouvernement de Vichy ce qui cause le départ du personnel de l’ambassade de France à Moscou.

Le colonel Charles Luguet qui était attaché de l’air du gouvernement de Vichy à Moscou profite du voyage pour faire défection et rallie la France libre. Il fait part au gouvernement provisoire basé à Londres de son analyse selon laquelle il ne voit pas les russes se faire battre rapidement. Il pense par ailleurs que le front de l’est se transformera en guerre d’usure qui tournera inévitablement en faveur des soviétiques grâce à leur énorme réserve de population mais aussi grâce à l’étendue du territoire russe.
Naissance du « Normandie »
Son analyse convainc le général de Gaulle d’envoyer une unité combattante en URSS qui considère important que les soldats français soient présent sur tous les fronts de la guerre aussi bien pour des raisons militaires que politiques. S’il pense tout d’abord envoyer la 1re division française libre ce sera finalement une unité aérienne qui sera envoyée.
Début 1942 les soviétiques acceptent et une liste de pilotes dirigés par le commandant Joseph Pouliquen est envoyée. Un premier groupe de chasse comprenant quatorze pilotes, une quarantaine de mécaniciens et le personnel administratif soit une soixantaine de volontaires arrivent sur le front en novembre 1942.

Le groupe de chasse 3 (GC 3) sera une unité française, sous commandement français, intégrée à une division soviétique.
La tradition veut que chaque unité des Forces Aériennes Françaises Libres (FAFL) prenne le nom d’une province française, c’est « Normandie » qui l’emporte. Le GC 3 rejoint donc la base d’Ivanovo (250 km au nord-est de Moscou) et les pilotes reçoivent leur instruction sur des Yak (avion de chasse soviétique) jusqu’au 14 mars 1943.
Ce petit avion de chasse en toile et duralumin est léger et très maniable. Les pilotes français feront des merveilles face aux redoutables chasseurs allemands (Messerschmitt 109 et Focke-Wulf 190). Le groupe de chasse sera commandé sur place par le commandant Jean Tulasne et son adjoint le capitaine Albert Littolff.
Une première campagne éprouvante
Les pilotes du « Normandie » sont lancé dans le grand bain le 22 mars 1943 pour leur première mission. Le « Normandie » participe donc à sa première campagne en 1943.
Il s’illustre notamment le 5 avril 1943 lors d’une patrouille effectuée par l’aspirant Durand et le lieutenant Preziozi parviennent à abattre deux Focke-Wulf allemands qui harcelaient un bombardier soviétique. Le « Normandie » fera encore plus parler de lui lors de la bataille de Koursk-Orel (par ailleurs la plus grande bataille de chars de l’histoire) en juillet où 14 pilotes français accompagnent les bombardiers soviétiques. Face à 30 Focke-Wulf allemands qui sillonnent le secteur, les pilotes français emportent 17 victoires homologuées du 12 au 28 juillet mais payent un lourd tribu : onze pilotes seront abattus dont le commandant Jean Tulasne et son adjoint Albert Littolff.

C’est le commandant Pierre Pouyade qui à rejoint le groupe de chasse après son évasion d’Indochine (occupée par les japonais) qui prendra la direction du « Normandie ».
Sans cesse harcelé et agacé par les prouesses de la chasse française le maréchal Wilhem Keitel ordonnera que tous les pilotes français capturés soient immédiatement fusillés sur place.

Au cours de l’année, les mécaniciens français seront redéployés vers le proche orient et seront remplacés par des mécaniciens soviétiques pour en faire une unité mixte : pilotes français et mécanos russes. Cette spécificité, une première dans l’histoire, contribuera à forger la légende du régiment.
Le « Normandie – Niemen » perd ses figures emblématiques
Exsangue après cette première campagne meutrière, le groupe passera l’hiver à Toula où il reçoit le renfort de nombreux pilotes français stationnés jusqu’alors en Afrique du Nord.
Désormais composée de soixante et un pilotes qui forment quatre escadrilles, l’unité entame sa seconde campagne le 25 mai 1944.
Dès le 28 mai le régiment de chasse perd l’une de ses figures emblématiques : Marcel Lefèvre dont l’avion prend feu à l’atterrissage après avoir été touché au niveau des circuits de carburants. L’as (14 victoires) meurt de ses blessure le 6 juin 1944 et aura droit à des obsèques en grande pompes en présence des plus hautes autorités russes et françaises. Enterrés près des grognards de Napoléon il sera fait, sur ordre de Staline, Héro de l’Union soviétique avec l’Ordre de Lénine.

Le 15 juillet 1944 c’est un autre héro du régiment qui passe l’arme à gauche, Maurice de Seynes dont l’avion s’écrase peu après son décollage à cause d’une fuite d’essence. Aveuglé puis intoxiqué par les vapeurs de carburant, il essaye en vain d’atterrir. Il reçoit l’ordre de sauter en parachute mais refuse pour ne pas abandonner son mécanicien Vladimir Belozub, qui ne dispose pas de parachute, à une mort certaine.
Le Yak-9 du pilote français s’écrase finalement lors d’une ultime tentative d’atterrissage et les deux occupants sont tués. Leur mort est immédiatement connue dans toute la Russie et les deux hommes seront enterrés cote à cote dans la même tombe sur ordre personnel de Staline. Le royaliste français et le paysan de la Volga reposeront cote à cote pour l’éternité. C’est le symbole parfait de la solidarité et de la fraternité qui uni les hommes de ce régiment malgré leurs différences.
Peu de temps après cette tragédie, le 21 juillet, pour récompenser l’unité française dans son rôle majeur dans les batailles qui ont permis la traversée du fleuve Niémen, Staline attribue, comme c’est la tradition dans l’aviation russe, le nom Niémen à l’unité qui sera désormais connu et entrera dans la postérité sous le nom de « Normandie – Niemen ».

Ordre est donné par Pierre Pouyade de faire repeindre sur les Yaks l’emblème du « Normandie – Niemen » en ajoutant aux deux léopards l’éclair blanc qui est l’emblème de la 303ème division aérienne à laquelle le régiment appartient.
Le « Normandie-Niemen » se couvre de gloire
Si elle à commencé sous un mauvais jour, cette seconde campagne reste malgré tout glorieuse pour les aviateurs français qui enchaînent les actes de bravoure. Le 16 octobre, le « Normandie – Niemen » effectue cent sorties et remporte vingt neuf victoire sans aucune perte.
Le 18, les français abattent 12 avions en quatre-vingt-huit sorties et deux jours plus tard ils effectuent soixante-neuf sorties qui leurs rapportent 11 victoire tandis que le 22 ce sont encore quatorze avions ennemis qui tombent sans perte du coté tricolore.

Fin novembre, le régiment de chasse est la première unité française à stationner sur le sol allemand. Deux as français : Marcel Albert (23 victoires homologuées) et Roland de la Poype (16 victoires homologuées) reçoivent la plus haute distinction du régime soviétique et deviennent « Héros de l’Union Soviétique », honneur qui n’a été décerné qu’une trentaine de fois à des étrangers.
Troisième campagne et victoire définitive sur les nazis
Les aviateurs rentrent en décembre à Moscou où ils rencontreront le général de Gaulle venu en visite diplomatique. L’intermède n’est que de courte durée, car la troisième campagne commence en janvier 1945 et les aviateurs participent à l’invasion de la Prusse Orientale et au siège de Koenigsberg.
Les combat sont acharnés et malgré l’héroïsme des français (trois citation à l’ordre du jour de Staline en janvier), les pertes sont énormes et le 21 février il ne reste que 25 pilotes.
Le 21 avril, le lieutenant Georges Henry obtient la dernière victoire du « Normandie – Niémen » mais il sera également le dernier mort quelques heures plus tard, abattu par la DCA allemande.

En juin 1945, après la victoire définitive sur les nazis, Staline, pour féliciter les français de leur comportement exemplaire décide de leur faire don des avions yak sur lesquels ils ont volé pendant la guerre. Il viendront se poser au Bourget le 20 juin devant une foule innombrable venu acclamer ces héros.
C’est la fin de l’épopée du Normandie – Niemen, qui, en 5240 sorties aérienne à livré 869 combats aériens et remporté 273 victoires confirmées (auxquelles il faut ajouter 37 probables et 47 avions endommagés). Quatre pilotes recevront la distinction « Héros de l’Union Soviétique » : Marcel Albert, Roland de la Poype, Jacques André et Marcel Lefèvre. Vingt et un seront fait compagnons de la libérations par le général de Gaulle. Sur les 97 pilotes qui ont servi dans le régiment, 42 sont morts pour la France.
Pour en savoir plus sur l’épopée du Normandie – Niemen :
– Un du Normandie – Niemen écrit par Roger Sauvage (2017)
– L’épopée du Normandie – Niemen écrit par Roland de la Poype (réédité en 2013)
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